lundi 14 juillet 2025

Thomas Mann et les Juifs

Le 6 juin 2025, une internaute écrivait sur Facebook : « Thomas Mann (1875-1955) est un écrivain juif allemand... » Nous avons été deux ou trois à lui signaler son erreur, elle s’en est excusée et a tout de suite rectifié.

Certes, un auditorium porte le nom de Mann à Tel-Aviv, pour honorer un donateur qui s’appelait Fredric R. Mann, mais là encore, il s’agit d’un nom pouvant être porté aussi bien par un Allemand d’origine germanique que par un Juif ashkénaze.

D’où mon titre !

Certes, Thomas Mann a tenu très tôt une position critique à l’égard du régime nazi. Dans son roman Le Magicien, Colm Toibin raconte comment Thomas Mann a fréquenté la communauté juive de Munich, dont les parents de son épouse Katia étaient d’éminents représentants. (Wikipedia)

Toujours est-il que :

Fils de son temps, Mann est d’emblée marqué par les préjugés régnants de son époque. Il adhère en effet à l’antisémitisme et la xénophobie auxquels il reste longtemps fidèle. Cependant, on assiste à une évolution progressive de l’image des Juifs dans son œuvre. Parallèlement, une réflexion de plus en plus approfondie et significative se dessine dans son évolution personnelle, intellectuelle et politique, notamment face à la virulence du problème juif dans l’Allemagne de Weimar et sous le IIIe Reich. Continûment chez lui, s’esquisse un parallèle entre le destin d’Israël et celui de l’Allemagne. Le leitmotiv se porte au cœur de l’œuvre à travers les balbutiements d’une germanité mise au sommet de ses plus nobles traditions. Le débat sur le sujet est sensible au point qu’il a longtemps été tabou outre-Rhin. La première rupture de ce silence est marquée par la publication de Thomas Mann und das Deutschtum (Thomas-Mann-Studien, 2004) et du livre de Jacques Darmaun, Thomas Mann et les Juifs. (www.memoiresdeguerre.com, 2021)

Thomas Mann und das Deutschtum, ou Thomas Mann und das Judentum ? Quoi qu’il en soit, on comprend bien, à cette lecture, que l’auteur de La Montagne magique et de La Mort à Venise n’était pas juif.

Frère cadet de l’auteur allemand Heinrich Mann et père des écrivains Erika et Klaus Mann, de l’historien Golo Mann, ainsi que du musicien Michael Thomas Mann, il était le fils de Thomas Johann Heinrich Mann et de Julia da Silva-Bruhns, qui n’étaient juifs ni l’un ni l’autre.


Sources : Geneanet ; www.memoiresdeguerre.com ; Wikipedia et sources afférentes, sur Thomas Mann, Katia Mann et Hedwig Dohm.

vendredi 11 juillet 2025

Boualem Sansal, sali de part et d’autre de la Méditerranée

Je découvrais que mon père n’était pas mon père [...] ; que ma mère n’était pas ma mère [...] que ma vraie mère était une inconnue qui m’avait conçu avec des inconnus de passage dans une maison interdite [...] — Boualem Sansal, Rue Darwin, 2011 (in Boualem Sansal, Romans 1999-2011, Gallimard (2025).

Le 8 juillet 2025 sur Facebook, à propos de cet écrivain incarcéré en Algérie depuis novembre 2024, un certain M.M.B. rapportait ceci : « Un [A]lgérien m’a sorti comme insulte suprême : Boualem Sansal est juif !!! »

Boualem Sansal à Jérusalem.

En effet, dans le monde arabo-musulman, « juif » (yahoud) est souvent l’insulte suprême et quand on veut discréditer quelqu’un, on fait courir le bruit qu’il est juif. Cependant, selon nombre d’adeptes d’une idéologie à la mode, ce ne serait pas de l’antisémitisme mais de l’ « antisionisme ».

Notons, au passage, la manière perverse dont le rédacteur de Wikipedia, cette encyclopédie en ligne gangrenée par les islamo-gauchistes, invoque avec insistance les liens que Boualem Sansal aurait entretenus avec « l’extrême droite », cette expression étant mentionnée pas moins de sept fois dans l’article en question.

Le bandeau d’Arte, sur la capture ci-contre, pourrait bien également être tendancieux. Dans la doxa actuelle, quand un artiste ou un écrivain est qualifié d’engagé, cela signifie qu’il est de gauche. On peut en déduire que l’expression « à contre-courant », telle qu’elle est employée ici, signifie « de droite ».

Boualem Sansal est le fils d’Abdelkader Sansal, un Berbère d’origine marocaine et issu d’une famille du Rif et de Khadidja Benallouche, une Kabyle algérienne. Son prénom, typiquement berbère, est donné seulement en Algérie. Inutile d’en dire davantage.


Sources : éditions Gallimard, « Vie et œuvre » in Boualem Sansal, Romans 1999-2011, Gallimard (2025) ; Wikipedia, consulté le 11 juillet 2025.

lundi 7 juillet 2025

Amira Casar, pas aussi juive que Sandra Benzakhem

Le 29 septembre 2024, sous le pseudonyme de « Winny », quelqu’un publiait ceci à propos des Juifs et de l’humour sur le site internet aufeminin.com :

« La vérité si je mens, le film qui a fait un carton, aurait-il eu autant de succès ou au contraire aurait-il été traîné dans la boue, si la plupart des acteurs n’avaient pas eux-mêmes été juifs ? »

Par ce signe tu sauras.

J’ai déjà dit ce qu’il en était de Richard Bohringer et de Bruno Solo. J’aurais sans doute pu ajouter José Garcia. Plus généralement, à propos de Marie-José Nat et d’Henri Guybet par exemple, ou de Charles Aznavour, ou encore de Jean-Pierre Cassel et son fils Vincent Cassel, j’ai expliqué que beaucoup de gens semblaient ignorer la différence entre un personnage et l’acteur qui le représente.

Si des acteurs juifs peuvent incarner des personnages non juifs (Peter Falk dans Columbo, Martin Landau dans Les Envahisseurs, Lea Solomon dans Nos chers voisins, Eli Wallach dans Le Bon, la Brute et le Truand, Kirk Douglas dans Spartacus et je pourrais citer mille autres exemples), pourquoi des acteurs non juifs ne pourraient-ils pas tout aussi bien incarner des personnages juifs ?

Il est exact que dans La vérité si je mens, un peu plus de la moitié des acteurs sont juifs... non sans compter Richard Anconina dont le personnage, Eddie Vuibert, ne l’est pas. Mais une bonne douzaine sur une bonne vingtaine, est-ce « la plupart » ?

Nul doute, cependant, que certains auront cru ou croient encore qu’Amira Casar, qui interprète Sandra Benzakhem, fille d’un confectionneur du Sentier (Victor Benzakhem, incarné par Richard Bohringer), est juive. Témoin cette question affichée par Google : « Amira Casar est-elle d’origine juive ? »

C’est surtout évident compte tenu de ce que j’ai rappelé précédemment. Il y a aussi son physique, et également son patronyme, à consonance étrangère et qui peut faire penser aux Khazars dont le mythe de la conversion massive au judaïsme alimente aujourd’hui les discours de haine envers les Juifs.

Et pourtant… actrice franco-britannique de confession chrétienne, née d’un père kurde et d’une mère russe, Amira Casar n’a pas d’origines juives connues.


Sources : Elle ; Le Figaro ; Instagram ; Télé-Loisirs ; XP Autographes.