lundi 26 mars 2018

Yaffa c’est de l’hébreu ? Booba alors…

Les forums de jeux vidéo ne brillent certes pas par la haute tenue des débats qui s’y tiennent, comme je l’avais déjà suggéré dans un article consacré à Kad Merad.

On ne sera pas trop surpris d’apprendre qu’il y est affirmé, entre autres crétineries, que la mère de Booba était juive : très vraisemblablement parce que le nom de jeune fille de celle-ci était Borsenberger, un patronyme à consonance germanique.

Si cela était vrai, alors on pourrait dire que Booba lui-même est juif, en vertu de la fameuse règle de matrilinéarité (est juif quiconque est né de mère juive).

Or, Borsenberger est clairement un nom lorrain, et ce n’est pas un nom juif : la carte des naissances sous ce nom publiée sur le site Geopatronyme ne laisse aucun doute à ce sujet (voir aussi mon article sur Dominique Bromberger).

Quant au père du rappeur, Seydou Nourou Yaffa, c’est un Sénégalais issu de la peuplade des Soninkés.

Sachant que le vrai nom de Booba est Élie Yaffa, on aura peut-être aussi pensé au prénom Élie, qui sait ? Mais comme je l’ai rappelé à propos de Serge Ayoub, il y a des Élie non juifs.

Je me demande si les auteurs du bobard sur Booba – ou sur sa mère – savent seulement que Yaffa est un mot hébreu (même si le vrai nom de Booba a très certainement une origine différente).

L’ancienne compagne de Booba s’appelle Patricia Cerqueira Vinces et est originaire du Venezuela, mais son patronyme est portugais. Qui sait si l’on ne trouverait pas des Juifs dans son arbre généalogique en remontant à quinze ou vingt générations ?

Ce qui changerait tout, concernant Booba. N’est-ce pas ?

samedi 17 mars 2018

Qui prend pour une réalité son désir que Harlem soit juif ?

D’après un de mes lecteurs, la rumeur attribuant une mère juive à Harlem Désir serait relayée par les « milieux soraliens ». Effectivement, l’antisémite fanatique Alain Bonnet, dit Alain Soral, fait circuler cette rumeur à coups de vidéos sur Youtube.

Or, cette rumeur trouve également d’autres types de relais, par exemple le site « communautaire » terredisrael.com.

Quand Harlem était juif

Il y est affirmé, entre autres balivernes, que la mère d’Harlem Désir aurait été alsacienne et que son nom de jeune fille aurait été Schwartz.

Pourtant, une généalogie détaillée de l’homme clé de SOS Racisme, sur plus de cinq générations, a été publiée il y a plus de vingt ans déjà, dans le volume 2 de l’ouvrage À la recherche de leurs racines de Joseph Valynseele et Denis Grando (L’Intermédiaire des chercheurs et curieux, 1996). Elle ne laisse aucun doute sur ce sujet.

Harlem Jean-Philippe Désir est le fils de Jean-Marie Désir, un Antillais descendant d’une famille d’esclaves de confession catholique, et de Nicole Duméry, Francilienne d’ascendance vosgienne et également de confession catholique.

Contrairement à certains racontars qui circulent sur Internet, Nicole Duméry, de son vrai nom, ne s’est jamais appelée Schwartz et n’a jamais été alsacienne de sa vie. Ses parents s’appelaient Philippe Duméry et Odette Cange.

Odette Cange était la fille de Marie-Ernestine Cange, elle-même fille de Marie-Joséphine Bernard. Dans la généalogie côté maternel, on trouve d’autres noms pas plus « juifs » comme par exemple Devaquet.


Sources : BNF, Geneanet sur Harlem Désir et sur sa mère, Novopress, Valynseele J. et Grando D., op.cit.

mardi 13 mars 2018

Si Alzheimer avait été juif, sa mémoire aurait-elle été conservée ?

Sur Facebook, juste après qu’un intervenant, juif lui-même, ait prétendu qu’Alfred Rosenberg était juif, un autre a prêté à son tour une identité juive à Alzheimer, le neuropsychiatre qui a donné son nom à la terrible maladie.

Certes, on trouve chez les Juifs ashkénazes des noms de famille de ce style, comme par exemple Wertheimer. Aloïs Alzheimer lui-même épousa en 1894 une jeune veuve qui s’appelait Cecilia Geisenheimer et qui était juive, mais dont le nom de jeune fille était Wallerstein. Geisenheimer était le nom de son premier époux : était-il juif ? C’est fort possible, mais je n’en sais rien.

Sur le site Coolamnews...
Aloïs Alzheimer est né en 1864 à Marktbreit, où existait alors une communauté juive. Par ailleurs, il n’y a pas de croix sur la sépulture d’Aloïs et de son épouse. Voilà pour les éléments qui ne contredisent pas l’hypothèse selon laquelle Alzheimer aurait été juif.

Et maintenant, passons aux choses sérieuses (c’est-à-dire, à tout le reste).

Les parents d’Aloïs Alzheimer habitaient Marktbreit, une ville à majorité protestante, mais ils voulaient que leurs fils aient une éducation catholique. Il envoyèrent donc Aloïs, puis ses frères, effectuer leur scolarité secondaire à Aschaffenburg, ville où se trouvait l’établissement catholique le plus proche, le Konigliche Humanistische Gymnasium que le père d’Aloïs avait lui-même fréquenté. Aloïs Alzheimer était donc catholique et né dans une famille catholique.

Sous le Troisième Reich, Aloïs Alzheimer, mort en 1915, n’a pas cessé d’être célébré comme une grande figure de l’Allemagne. C’est apparemment ce qui a sauvé ses enfants et petits-enfants, qui ont certes dû faire profil bas mais qui ont pu demeurer près de Munich pendant toute la guerre et ont tous survécu. On peut raisonnablement supposer que les choses se seraient passées autrement si Aloïs Alzheimer lui-même avait été juif.


Sources : Centre médical de l'Université du Nebraska