mardi 28 janvier 2014

Torquemada, ni juif ni marrane

D’après Wikipedia, le tristement fameux Tomás de Torquemada, « comme son oncle, le cardinal et théologien [...] Juan de Torquemada », serait « issu d’une famille de nouveaux chrétiens [...] », Juan de Torquemada étant présenté comme « vraisemblablement descendant de conversos ».

En fait, nombreux sont ceux, juifs comme antisémites, qui répètent à qui veut les entendre que Torquemada lui-même était un Juif converti. Cet ignoble racontar est devenu une véritable tarte à la crème, au point que celui qui affirme le contraire risque de passer pour un original.

On peut le dire sur un ton sûr.

Sur son site internet (PHDN), Gilles Karmasyn a mis en pièces cette « ineptie », selon ses propres termes, et je ne peux que reprendre ici l’essentiel de ses remarques :

« Lorsque quelqu’un écrit que Torquemada est né juif, l’auteur des présentes lignes a toujours envie de demander si son oncle, le cardinal Juan de Torquemada, [...] figure clef de l’inquisition espagnole bien avant Tomás, [...] avait assisté à la Bar-mitsvah de son neveu... »

« Torquemada n’est pas « né juif » et ne s’est pas converti au catholicisme, précise Gilles Karmasyn. Il est né catholique de parents catholiques. [... Il] a été élevé par son oncle, le cardinal Juan de Torquemada dans son couvent de San Pablo de Valladolid. »

Selon Gilles Karmasyn, « le fait même de son martèlement permet de dire qu’il ne s’agit pas d’une erreur. Le nom de Tomás de Torquemada est associé dans la mémoire collective aux agissements de l’Inquisition et aux persécutions subies par les Juifs dans l’Espagne d’Isabelle la Catholique. Faire porter la responsabilité de ces horreurs à un Juif, voilà le but du mensonge. Il s’agit bien d’un mensonge à caractère antisémite. »

En somme, il en est de même pour les prétendues origines juives de Torquemada que pour celles d’Adolf Hitler. Le pire est que des Juifs tombent dans le panneau et colportent à leur tour le mensonge délétère.


Sources : Wikipedia et phdn.org

lundi 27 janvier 2014

Alain Bonnet, dit Soral, ou la passion du Juif

Puisque circulent des rumeurs attribuant des « origines juives » à des fanatiques de la haine anti-juive comme Torquemada, Hitler, Staline ou Ahmadinejad, pourquoi pas une rumeur similaire concernant Alain Soral ?

Eh bien, c’est chose faite, par les soins de l’intéressé lui-même.

Depuis que l’Europe a ouvert les yeux sur la Shoah, le racisme anti-juif a officiellement très mauvaise presse, si bien que les antisémites nient être antisémites.

Il arrive même qu’ils prétendent être juifs ou avoir des origines juives.

Les « origines juives », c’est certes un concept assez souple : il suffit, pour s’en prévaloir, de se trouver un ancêtre juif en remontant à la troisième ou quatrième génération... ou alors, de s’en inventer.

Alain Soral aurait lancé lui-même cette rumeur, affirmant que Soral viendrait de Solal. Comme un fanatique trouve toujours plus fanatique que lui, voilà que des désaxés le traitent de Juif ou de « sioniste ».

Cette ineptie a été démentie par la sœur de l’intéressé. Agnès Soral, qui condamne l’idéologie haineuse de son frère, demande : « Aimeriez-vous vous appeler Agnès Hitler ? » Voilà pour ceux qui s’imagineraient que Soral est un patronyme porté par des Juifs.

En outre, le vrai nom du triste sire est Alain Bonnet. Soral est le nom du village dont sa famille est originaire et qui est situé dans le canton de Genève, en Suisse.


Sources : Le Nouvel Observateur

dimanche 26 janvier 2014

Les prétendues origines juives d’Ahmadinejad

La rumeur des prétendues origines juives de l’ancien président iranien aurait été lancée par un de ses rivaux, l’Ayatollah Khazali. De façon méprisable, deux ou trois médias britanniques l’ont répercutée, sous prétexte que la famille de Mahmoud Ahmadinejad aurait changé de nom à un moment donné, apparemment suite à sa conversion à l’islam.

Le nom d’origine des Ahmadinejad serait Sabouridjan. Certains ont affirmé que ce patronyme désignait le métier de décorateur de tapis et que cette activité aurait été autrefois exercée essentiellement par des Juifs.

Un antisémitisme perçant

D’autres auront jugé plus crédible d’établir un rapport entre le terme « Sabour » et le châle de prière juif.

Les uns et les autres auront soigneusement évité le rapprochement avec une région qui porte ce nom au Pakistan.

Dans l’hypothèse où la famille de ce sinistre personnage ne serait musulmane que depuis relativement peu de temps, son ancienne religion ne serait certainement pas le judaïsme, mais bien plus probablement le zoroastrisme, ou bien le parsisme, ou encore, autre possibilité, l’hindouisme.

Certes, un antisémite peut parfois avoir des ancêtres juifs, mais dans le cas de Mahmoud Ahmadinejad, comme dans le cas d’Hitler, les motivations d’un tel on-dit sont assez évidentes.

En Orient, une technique courante pour discréditer quelqu’un consiste à faire courir le bruit qu’il aurait une ascendance juive (voir aussi mon article sur Kadhafi).

En Occident, il y a la tentative grossière de trouver dans la folie meurtrière d’un homme une raison soi-disant psychanalytique, mais aussi le besoin d’alléger une mauvaise conscience collective en inventant des responsabilités « juives » derrière l’antisémitisme.

mardi 21 janvier 2014

Nabilla juive ? Allô, nan mais allô, quoi !

« Avec un papa musulman, une maman chrétienne et une grand-mère juive, c’était compliqué. » Une grand-mère juive, serait-ce l’origine de la rumeur ? Or, un papa musulman et une maman chrétienne pourraient difficilement avoir donné naissance à des enfants juifs.

Mais Benattia, n’est-ce pas juif ? Benattia est un patronyme d’Afrique du Nord, sans doute apparenté à Attia (« Ben » signifiant « fils de ») et donc susceptible d’être porté par des Juifs, mais peut-être pas uniquement.

Un certain nombre de patronymes sont portés par des Arabes aussi bien que par des Juifs, comme par exemple Bentata, Bokhobza, Haddad, Tibi, etc. Et comme disait Shakespeare : what’s in a name ?

Nabilla (plus souvent avec un seul « l ») est un prénom donné aux filles dans des familles maghrébines de confession musulmane.

Le nombril de Nabilla
Nabilla Benattia explique : « J’ai des racines algériennes de par mon père et italiennes de par ma mère qui est calabraise ». Elle déclare ne pas avoir de lien avec la religion (laquelle ?) et se sentir davantage italienne parce qu’elle a grandi avec sa mère. Elle ajoute que celle-ci va à la messe. On admettra qu’une Calabraise qui va à la messe n’est sans doute pas juive et que sa progéniture pourrait difficilement l’être, surtout avec un père non juif.

« Si j’étais restée avec mon père, nous dit aussi Nabilla, je ne sais pas où je serais aujourd’hui. En train de faire un tajine ou carrément mariée ? » En l’occurrence, si grand-mère juive il y a, je ne sais si c’est du côté maternel ou paternel. Apparemment ce serait du côté maternel. À moins que ce ne soit que pure invention.

Il faudrait m’expliquer comment on peut être né juif quand on a une mère qui va à la messe et un père musulman.

Côté paternel, si le grand-père avait été juif aussi, le père de Nabilla ne se prénommerait pas Kouthir, il aurait peu de chances d’être algérien (l’Algérie est judenrein depuis un demi-siècle) et il pourrait encore plus difficilement être un fonctionnaire algérien à l’ONU.


Sources : tvmag.lefigaro.fr et terredisrael.com

mercredi 15 janvier 2014

Franco de port et d’emballage

En Espagne, au temps de l’inquisition, les Juifs qui n’avaient pas pu rechercher des cieux plus cléments s’étaient convertis, un bon nombre d’entre eux restant secrètement fidèles à leur identité. Il existe aujourd’hui encore des Espagnols et même des Français méridionaux qui se savent ou se supposent descendants de marranes, et selon certains, c’est ce qui expliquerait que le général Franco, pendant la Seconde Guerre mondiale, ait pris des mesures particulières pour protéger les Juifs pénétrant en territoire espagnol.

Adler y va franco...

Ainsi, Alexandre Adler, qui passe auprès d’un grand nombre de naïfs pour un vrai historien, évoquait un jour à propos de Franco, « né dans une famille de marins », une « origine juive-nouvelle-chrétienne » (sic) qui serait « un secret de Polichinelle ».

De tels propos n'ont pas beaucoup de sens. Tout d’abord, la notion d’origine(s) juive(s) est vague : pour avoir une « origine juive », combien faut-il avoir de parents, de grands-parents ou d’arrière-grands-parents juifs ? À combien de générations faut-il remonter ? Du côté de la mère, du côté du père, ou des deux côtés ?

Je l’ai déjà écrit, la judéité n’est pas un gène qui se baladerait entre les générations, tantôt visible et tantôt caché, sans qu’aucune tradition religieuse et culturelle ne l’accompagne.

En outre, en Espagne, les descendants des marranes étaient voués tôt ou tard à renoncer à leur identité secrète et à s’assimiler complètement au reste de la population. Dans ce contexte, que peut signifier l’expression « nouvelle-chrétienne » ? Et quel rapport avec les marins ? De surcroît, bien rares, ce me semble, ont été les familles juives qui s’y sont installées ou réinstallées depuis la fin du XVe siècle.

Francisco Franco y Bahamonde, dont la mère était « une femme très pieuse » (Wikipedia), fut baptisé dans la paroisse San Francisco du quartier des officiers de Ferrol le 17 décembre 1892. Tout ce que l’on sait de lui indique clairement qu’il était catholique de confession, de culture et de naissance.

Sans compter que durant son règne, l’Espagne ne reconnaissait pas Israël et abritait l’ignoble Darquier de Pellepoix, ancien commissaire aux Affaires juives, condamné à mort par contumace à la Libération. En outre, le judaïsme y était interdit.

Peut-être Franco se connaissait-il des origines marranes, comme la rumeur le dit. C’est très possible. Mais l’idée qu’il l’ait été lui-même n’est que déraison.