[...] il y a en lui un mélange de catholique du Moyen-âge et d’impie satanique [...] — Ricardo Viñes, journal intime, 1896
C’est par la bouche d’un camarade d’études que m’était parvenu pour la première fois le bobard faisant de Maurice Ravel un Juif. Plusieurs mauvaises raisons peuvent avoir servi d’appui à cette thèse :
Un Maurice helvéto-basque... |
Mon antithèse ne m’aura pas demandé de trop gros efforts de recherche :
Aussel, Boudarel, Carel, Duhamel et bien d’autres noms en « -el » ne sont pas des noms juifs et n’ont rien à voir avec l’hébreu. Ravel est un toponyme fréquent surtout du côté de la Loire et de la Haute-Loire (voir geneanet.org et genealogie.com). Les sceptiques pourront effectuer un sondage auprès des Ravel de l’annuaire téléphonique et passer en revue les noms des 24 membres du bureau initial de France-Palestine (parmi lesquels Joseph Paul-Boncour, Aristide Briand, Jules Cambon, Justin Godart, Édouard Herriot, Paul Langevin, Paul Painlevé et Raymond Poincaré), ils verront s’ils rencontrent beaucoup de Juifs. Maurice était aussi le prénom de l’antisémite Barrès, du négationniste Bardèche et du collabo Papon. Il n’existe aucun lieu en France dont les natifs seraient généralement juifs, et enfin, des musiciens non juifs ont composé de la musique « juive » ou à thème juif (lire mes articles sur Max Bruch, Dmitri Chostakovitch et Sergueï Prokofiev).
En guise de synthèse, je préciserai que Maurice Ravel avait été baptisé sous le nom de Joseph Maurice Ravel et que son père, Pierre Joseph Ravel, d’ascendance suisse et savoyarde, avait rencontré sa mère Maria Deluarte (devenue Marie Delouart), une Basque issue d’une famille espagnole, à Aranjuez (Wikipedia). On notera, en outre, que le premier prénom (non usuel) du compositeur, Joseph, était le second prénom (usuel) de son père (une telle chose est plutôt rare chez les Juifs).