lundi 27 janvier 2020

À Huysmans, Badinter n’est pas apparenté

Le 8 janvier 2020, sous le pseudonyme douteux de « Pfff », quelqu’un publiait sur un blog intitulé Un Blog de Sel le commentaire suivant, encore plus douteux :

[…] Dans son roman, Houellebecq ressort Joris-Karl Huysmans. Un échappé de l’école naturaliste, de l’immonde écurie Zola, un juif converti au catholicisme, pas par réaction (quoique), par adhésion. […]

Confondrait-on « -mans » et « -man » ?
L’écrivain et critique littéraire auquel il est fait référence de cette manière, qui a vécu dans la seconde moitié du XIXe siècle, s’appelait en réalité Charles Marie Georges Huysmans. Son père était néerlandais et s’appelait Godfried Huysmans. Sa mère était française et s’appelait Malvina Badin.

Huysmans est tout simplement un nom de famille flamand, qui signifie « l’homme de la maison » et qui est l’équivalent du nom allemand Hausmann (dont Haussmann est une variante).

Badin n’a évidemment pas de lien avec Badinter. C’est un nom de famille du midi de la France, tout simplement.

Joris-Karl Huysmans fit carrière au ministère de l’Intérieur et collabora un temps, à partir de 1880, au journal Le Gaulois, qui était hostile à l’expulsion des jésuites décrétée à l’époque par le gouvernement.

Il est exact que Huysmans s’était converti au catholicisme, vers la fin de sa vie. Cependant, avant cela, il était protestant, et non pas juif.

Je l’ai déjà mentionné, des parents juifs, même éloignés de la tradition, n’auraient jamais donné à leur fils le prénom Marie, pour deux raisons évidentes : d’une part, la tradition juive interdit de donner à un enfant un prénom de l’autre sexe et d’autre part, le prénom Marie donné à un enfant de sexe masculin fait bien évidemment référence à la mère de Jésus-Christ.


Sources : filae.com, sur les noms Badin et Huysmans ; Wikipedia, sur le nom Huysmans et sur Joris-Karl Huysmans ; Wiktionary, sur le nom Huysmans.

vendredi 17 janvier 2020

Philippe Val, en famille chez les Juifs ?

[... En Israël] je suis chez moi [...] on est de la même famille [...].
— Philippe Val, interviewé par Radio Taf en octobre 2016.

C’est probablement en raison de ses déclarations favorables à Israël qu’il passe pour juif aux yeux de certaines personnes. Ce peut être aussi parce que, directeur de Charlie Hebdo, il avait congédié Maurice Sinet, dit Siné, suite à une publication dans laquelle certains ont cru voir — non sans bonnes raisons — de l’antisémitisme.

Que valent ces on-dit sur Val ?

Or, Philippe Val a déclaré à plusieurs occasions, entre autres dans l’interview en Israël pour Radio TAF (une radio israélienne francophone) dont un extrait est cité ci-dessus, qu’il n’était pas juif.

Ainsi, dans une autre interview rapportée par La Nouvelle République :

« […] j’étais le premier à dire que l’antisionisme était un antisémitisme, et je ne suis pas juif. […] »

Autre exemple, plus explicite, sur le site d’Actualité juive :

« Bien que je ne sois pas juif, je me sens citoyen d’Israël au même titre que je me sens citoyen de toutes les grandes démocraties respectueuses des lois protectrices de l’individu. Je ressens une sorte de lien de filiation, je me sens l’enfant de tous ces pays convertis à la démocratie représentative et ayant accepté le consensus autour d’une Constitution universaliste pour ce qui concerne les droits humains. En clair, je me sens parfaitement chez moi à Paris, à Rome, à Tel-Aviv ou à Berlin. Et j’ai la conviction qu’il faut tout faire pour que cela dure et prospère. »

Philippe Val aurait-il cependant oublié que la capitale d’Israël n’est pas Tel-Aviv mais Jérusalem ?

Quoi qu’il en soit, Val est son vrai nom. Val, pas Wahl. Et même si c’était Wahl… mais de toute façon, c’est Val.


Sources : Philippe Val, Tu finiras clochard comme ton Zola, L’Observatoire, 2019 ; Actualité juive ; La Nouvelle République ; Radio Taf ; Wikipedia.

jeudi 2 janvier 2020

Boris Johnson, ni juif ni turc

Le site internet intitulé « Juifs célèbres » publie une fois de plus un bobard, que reprend à son compte le site de la Ligue de défense juive. Cette fois, il s’agit du nouveau Premier ministre britannique, Boris Johnson : « Le [P]remier ministre du Royaume[-]Uni, Boris Johnson, est juif ».

Vous m’en direz tant.

Johnson aurait « révélé ses racines juives lors de sa visite au Kotel » (le mur « des Lamentations »). En outre, la mère de Boris Johnson, Charlotte Mary Offlow Fawcett, serait « la fille d’une [J]uive ashkénaze ».

Boris Johnson au Kotel

« Son arrière-grand-père maternel était rabbin en Lituanie », est-il précisé. Il s’agit d’Elias Lowe, fils de Charles Lowe et de Sarah (Sophie), née Ragoler. Voilà qui est extrêmement douteux.

En effet, l’épouse d’Elias Lowe, Helen Porter, n’était pas juive. Comment un rabbin aurait-il pu épouser une non-juive ? C’était strictement impossible, à moins que celle-ci ait été convertie en bonne et due forme. Ce n’était pas le cas.

Boris Johnson, de son nom complet Alexander Boris de Pfeffel Johnson, est le fils de Stanley Patrick Johnson et de Charlotte Johnson Wahl, née Fawcett, elle-même fille de Sir James Fawcett et de Frances Beatrice, veuve de Nicholas Anthony Maria Wahl, née Lowe, fille d’Elias Avery Lowe et de Helen Tracey Porter, laquelle était la fille de Henry Clinton Porter et de Clara, née Holcombe, fille de Judson Holcombe et de Maria, née Nobles.

Le père de Boris Johnson, Stanley Patrick Johnson, était le fils d’Osman Ali Kemal Johnson, surnommé Wilfred et d’Irene Williams, « Wilfred » étant lui-même le fils de Bey Ali Kemal, né à Istanbul, et de Winifred Emma Mary, née Brun.

Quant à la grand-mère de Boris Johnson, Irene Johnson, née Yvonne Eileen Irene Williams, elle était la fille de Stanley Fred Williams et de Marie-Louise von Pfeffel.

Dans la généalogie de Boris Johnson, nous trouvons donc simplement un arrière-grand-père juif côté maternel, le père de sa grand-mère. Du côté paternel, nous trouvons un arrière-grand-père turc de confession musulmane.

Bien évidemment, Boris Johnson lui-même n’est pas plus juif que turc, et pas plus juif que musulman.


Sources : Juifs célèbres ; geni.com, sur Boris Johnson, sur Charlotte Fawcett, sur Frances Lowe, sur Clara Holcombe, sur Elias Lowe, sur Stanley Johnson et sur Irene Williams.

lundi 9 décembre 2019

La non-judéité des Debré fait-elle débat ?

Dans son livre Une histoire de famille (Robert Laffont, 2019), Jean-Louis Debré, qui est un des fils de Michel Debré, raconte l’histoire de ses ascendants, celle d’une « famille d’immigrés juifs ». Mais qui est encore juif chez les Debré ?

Jean-Louis Debré a épousé Anne-Marie Engel. Engel est un nom qui peut être porté par des Juifs, mais c’est surtout un nom allemand, alsacien et lorrain. Les prénoms des enfants du couple, Charles-Emmanuel, Guillaume et Marie-Victoire, ne suggèrent absolument pas que l’on aurait affaire à une famille juive.

Bernard Debré, un chrétien face
aux chrétiens à l’occasion d’une
émission d’une radio chrétienne.

Il est de bon ton, aujourd’hui, de se trouver des « origines juives », et l’on sait que le professeur de médecine Robert Debré, père de Michel Debré, était fils de rabbin. Naturellement, il n’en faut pas davantage pour que l’on entende dire ici ou là que l’ancien ministre du général de Gaulle et coauteur de la Constitution était lui-même juif.

Certains croient même pouvoir considérer comme juive toute personne portant ce patronyme, comme par exemple Isabelle Debré, épouse de Vincent Debré, née Isabelle Le Poittevin de La Croix-Vaubois.

Or, le professeur Robert Debré avait été le dernier Juif de la lignée et il s’était lui-même converti au christianisme. Il n’aura certes pas été le premier fils de rabbin converti. Son épouse, Jeanne Debat-Ponsan, médecin et fille de l’artiste Édouard Debat-Ponsan, était catholique.

L’homme politique Michel Debré était donc né de deux parents catholiques. Quant à son épouse, elle s’appelait Anne-Marie Le Maresquier. En outre, ministre de la défense au moment de l’affaire des vedettes de Cherbourg, il avait voulu couler les bateaux, quitte à provoquer la mort de tous les membres des équipages israéliens. Il avait fallu toute la détermination du Premier ministre de l’époque, Jacques Chaban-Delmas, pour l’en empêcher.

En 1997, critiquant un projet de loi de Jean-Louis Debré sur l’immigration, Nassima Iselin, dont le mari est le cousin d’Anne-Marie Engel, épouse Debré, évoquait « le brassage de religions et d’origines dans sa famille ».


Sources : Jean-Louis Beaucarnot, Le Tout politique (L’archipel, 2012) ; filae.com, sur Engel ; Kountrass ; Libération ; Wikipedia, sur le nom Engel et sur la famille Debré.

vendredi 6 décembre 2019

Franz-Olivier Giesbert se fait traiter de juif

[...] Les statistiques officielles montrent que la haine contre les Juifs se traduit par trois fois plus d’actes violents que celle qui vise les musulmans. Sans parler des listes de Juifs qui circulent sur Twitter, comme au temps du IIIe Reich, et où figure, entre autres, le nom de votre serviteur qui n’est pas juif, mais dont le grand tort est de défendre la communauté juive et le droit d’Israël à l’existence. Les cafards sont de retour. — Franz-Olivier Giesbert (Le Point, 11 novembre 2019)

Le bobard selon lequel Franz-Olivier Giesbert serait juif par sa mère a largement circulé, avant même qu’il se mette à protester publiquement contre l’antisémitisme et à défendre Israël. Il me semble même qu’il a été propagé un moment par Wikipedia.

Franz-Olivier Giesbert
se dit chrétien de naissance

Aux dernières nouvelles, son père, Frederik Giesbert, un Américain né à Chicago, aurait eu des origines allemandes, autrichiennes, écossaises et – entre autres – juives. Il était le fils d’Edmund William Giesbert et de Frances Amelia Proudfoot, elle-même fille de Frederick William Proudfoot et d’Andrea Hofer, dont le père se prénommait Andreas Franz Xaver (ce qui indique qu’il était chrétien).

Quant à la mère de « F.O.G. », Marie Allain, épouse Giesbert, elle était issue d’une famille normande et catholique. Elle était la fille de Jean Marie Prosper Allain et de Jeanne Edmé Élisabeth Lenoir. Celle-ci était la fille de Lucien Edmond Lenoir et de Marie Jeannette Braun, laquelle était la fille de Joseph Braun et Marie Élisabeth Brolly, cette dernière étant la fille d’Élisabeth Schneider.

On trouve des Braun et des Schneider chez les Juifs, certes, mais ce sont aussi des noms de l’Est de la France. En fait, ce sont des noms germaniques courants, tout simplement. Brolly est un nom porté en Alsace et en Lorraine, et rien ne permet de penser que ce serait un patronyme porté par des Juifs.

Enfin, Franz-Olivier Giesbert a été élevé dans la religion catholique, il se dit chrétien de naissance (Famille chrétienne, septembre 2016) et il a un frère prénommé Jean-Christophe.


Sources : Akadem ; Famille chrétienne ; Geneanet sur Marie Allain, sur Marie Brolly, sur le nom de famille Brolly, sur Andrea Hofer ; Le Point ; Wikipedia.

lundi 25 novembre 2019

Mélissa Theuriau, juive selon la presse hitlérienne

J’aurais pu écrire : « selon la presse algérienne ». Mais finalement, quelle différence ? Comme nous avons déjà eu maintes fois l’occasion de le remarquer, la presse algérienne cultive le conspirationnisme antisémite, tout comme le faisaient Hitler et ses semblables. Et naturellement, elle voit des Juifs partout.

En automne 2019 sur Facebook, un internaute apparemment prénommé Abdelaziz a affirmé que la femme de Jamel Debbouze était juive. Sur le site internet info-israel.news, à propos de la presse algérienne, on peut lire : « Pour rappel, sa femme Mélissa Theuriau étant juive, son mari Jamel se serait converti au judaïsme. D’où viennent ces rumeurs ? À cause d’une simple kippa sur la tête de l’acteur lors d’une visite en Israël sur l’esplanade du Kotel. »

Vous dites ? Étant juive ?

Curieusement, il semble, à lire ce qui précède, que l’administrateur du site info-israel.news, tout en citant la presse algérienne, ait lui-même tenu pour acquise la judéité de Mélissa Theuriau. Ou alors, la formulation était extrêmement maladroite.

Sur Google, en tête des recherches associées au nom Theuriau, nous avons « melissa theuriau origine » et « melissa theuriau israel ».

Or, dans Midi Libre, Jamel Debbouze se présente comme « Français, musulman, marié à une chrétienne » : « […] je suis père de deux enfants, marié à une chrétienne, journaliste [...]. » On peut supposer, sans être trop téméraire, que Jamel Debbouze sait quelle est l’appartenance religieuse de la femme qu’il a épousée.

Nous avons aussi la version de l’intéressée : « De mon côté, venant d’une famille française qui, même si elle ne pratique pas, est chrétienne, je redoutais un peu que les siens ne veuillent me changer, voire me convertir. » (Elle). On peut supposer, sans être trop téméraire, que Mélissa Theuriau sait quelle est l’appartenance religieuse de sa propre famille.

La presse française nous donne également des indications à propos de leur mariage : « L’humoriste [...] et la journaliste de M6 […] avaient choisi de se marier devant ‘Dieu et Allah’. Le mariage catholique a été célébré dans l’une des salles de l’abbatiale » (La Dépêche). Leur mariage a également été célébré par un imam à Marrakech (ibid.).

Selon le site filae.com, le patronyme Theuriau, variante de Thierry, serait un « nom de personne d’origine germanique », à l’origine « theoderic, composé de theod = peuple et ric = puissant ». D’autres détails nous sont proposés sur le blog etymo-logique.com. Les variantes sont nombreuses : Teuriot, Teurriot, Theuriaut, Theuriaux, Theurion, Theuriot, Thouriot, Thuriot, Touriot... Les prénoms les plus populaires chez les Theuriau sont Marie, Jean, Jeanne, Pierre, François, etc. (geneanet.org).

mardi 19 novembre 2019

On aura beau se leurrer sur Bolloré...

Le jour où j’avais vu le nom de Vincent Bolloré sur une prétendue liste de Juifs, laquelle était publiée sur la base des motivations que l’on devine, il m’avait paru évident qu’il s’agissait une fois de plus d’une absurdité, comme dans le cas de Pierre Bergé, de Martin Bouygues, de Geneviève de Fontenay ou d’Élisabeth Guigou, pour ne citer que quelques exemples.

Vincent Bolloré est issu d’une famille d’industriels bretons. Il est fils de Michel Bolloré et de Monique Follot, et ces deux patronymes ne suggèrent absolument pas une ascendance juive.

Bon, alors, Bolloré ?

Or, il s’avère que la grand-mère maternelle de Vincent Bolloré, l’épouse de son grand-père maternel Henri Émile Follot, s’appelait Nicole Goldschmidt, et qu’elle était juive.

Selon la loi juive, « est juif quiconque est né de mère juive ». Si l’on applique cette règle à la lettre, ou peut-être plus exactement à la manière d’une loi mathématique, alors la mère de Vincent Bolloré était juive et par voie de conséquence, l’intéressé l’est aussi.

On connaît des exemples de personnes revendiquant leur identité juive après avoir appris que leur grand-mère maternelle était juive, alors même que leurs trois autres grands-parents ne l’étaient pas.

Il semble que Vincent Bolloré ait été très attaché à sa grand-mère maternelle. Cependant, outre le fait qu’il soit né de deux parents de confession catholique, il est lui-même devenu catholique pratiquant.

À Jean-Marie Lustiger, qui avait déclaré après sa nomination à l’archevêché de Paris qu’en devenant chrétien il avait assumé son judaïsme, le Grand rabbin de France de l’époque, René Samuel Sirat, avait répondu : « On ne peut pas être juif et chrétien en même temps. »

Comme je l’ai suggéré précédemment, notamment à propos de Mouammar Kadhafi, l
’identité juive n’est pas affaire de logique mathématique. Si la logique et le bon sens divergent, sans doute convient-il ici d’opter pour le bon sens. Et que dit le bon sens ? Qu’un homme qui est né de parents chrétiens, qui a trois grands-parents non juifs et qui est lui-même catholique pratiquant, n’est pas juif.


Sources : Entreprendre ; Wikipedia.